Beck F., Firdion J.-M., Legleye S., Schiltz M.-A., Les minorités sexuelles face au risque suicidaire. Acquis des sciences sociales et perspectives, Saint-Denis, Inpes, 2010, (Dossiers Santé en action).
ISBN 978-2-9161-9222-2
Depuis la fin des années 1990 (aux Etats-Unis d ?abord, puis dans d’autres pays dont la France), les enquêtes les plus probantes ont mis en évidence un risque suicidaire plus élevé parmi les jeunes des minorités sexuelles (gays, lesbiennes, bisexuel(le)s, transgenres) et ceux qui se questionnent sur leur identité sexuelle ou de genre.
L’homophobie est aujourd’hui le facteur de risque le mieux identifié pour comprendre cette sursuicidalité. Les phénomènes d’exclusion, de mépris et de stigmatisation peuvent en effet conduire à une perte d’estime de soi, une perte de confiance dans l’avenir et les autres. Le soupçon de non-conformité de genre – qui peut toucher tout jeune accusé(e) de faire partie d ?une minorité sexuelle, indépendamment de son orientation sexuelle effective – peut également conduire à une grande détresse qui favorise les symptômes suicidaires.
Quelle que soit la stratégie mise en oeuvre par le jeune pour éviter ou résister à une possible discrimination, le coût psychique et physique est souvent élevé, même à long terme. D’autant que par rapport à d’autres types de discriminations, les discriminations homophobes ou liées à une non-conformité aux stéréotypes de genre se caractérisent par un faible soutien de la famille, une faible intervention des adultes et des préjudices particulièrement précoces. Il existe en France des initiatives locales de prévention de ces discriminations et du risque suicidaire qui gagneraient à être mieux connues et parfois généralisées. Autre piste de travail importante : la sensibilisation des divers professionnels en contact avec les jeunes, qu’ils viennent du champ éducatif, sanitaire, social, judiciaire. Enfin, pour continuer à améliorer nos connaissances sur ces phénomènes spécifiques que sont l’homophobie, la lesbophobie, la transphobie et le sexisme, il semble essentiel de les intégrer plus nettement en amont de la mise en place des enquêtes.
François Beck est statisticien et sociologue, chercheur à l’Institut National de Prévention et d’Éducation pour la Santé (INPES) où il est responsable du Département des Sciences Humaines. Il est également chercheur associé au Cermes3-Équipe Cesames.